La menace incestueuse qui pèse sur ce récit peut faire aussi référence au désir fantasmé de la petite fille pour son père. La Princesse s'inquiète tout d'abord d'un tel dessein, mais entretient des hésitations, sensible à l'insistance de son père et à l'amour qu'elle-même lui porte. ». Ailleurs, le plan qui montre au spectateur le Prince s'approchant de face de la masure de Peau d'âne et se heurtant à une paroi invisible est très similaire au plan extrait du film Orphée (1950) dans lequel le poète, également joué par Jean Marais, se trouve incapable de traverser un miroir magique[7] ; ce même film partage avec Peau d'âne le motif du reflet de soi dans une mare, saisi par Jean Marais chez Cocteau et par Catherine Deneuve chez Demy[142]. L'arrivée de la Princesse à la ferme consiste en un simple ralenti. Tous deux se connaissaient depuis 1957. Là est d'ailleurs le paradoxe : c'est en imposant par caprice la cérémonie de l'essayage, qui semble profondément ennuyer ses parents, que le Prince pourra faire reconnaître officiellement la Princesse et ainsi ne pas être taxé de caprice[57]. Mais au contraire du conte, si ici le Roi prend, seul, la décision d'épouser sa fille, celle-ci n'y répugne pas et oppose aux arguments de sa marraine son propre amour pour son père[160], poussant ainsi certains critiques à évoquer le complexe d'Électre au sujet de l'attirance d'une fille pour son père. Une interprétation fait dériver le conte de Peau d'âne d'un mythe préhistorique semblable à celui de la femme-cygne, où l'animal central serait un mammifère quadrupède[4] et que l'on pourrait mettre en rapport de transformation structural avec le motif mythique de la ménagère mystérieuse[5]. Dès les années 1950, il a établi le script d'une hypothétique adaptation de La Belle au bois dormant, qui ne donne pas de suite ; mais les films qu'il réalise au début des années 1960, Lola (1961) et Les Parapluies de Cherbourg (1964), font déjà référence aux contes de fées et jouent avec leurs codes[7],[8]. Des décennies après la sortie de Peau d'âne, ses chansons composées par Michel Legrand ne cessent d'être citées dans la culture populaire. [...] Il fallait que je la réadapte. L'affiche dessinée par Jim Léon en est l'exemple. La ressortie de l'œuvre restaurée, le 2 juillet 2014, et son exploitation vidéo subséquente à partir de novembre 2014 sont l'occasion de nouvelles diffusions dans les salles, notamment grâce à la maison de production Ciné-Tamaris, qui gère exclusivement les films de Jacques Demy et d'Agnès Varda. Lors de sa ressortie de 1996, cet album est complété par 5 titres inédits en CD, dont les deux enregistrés par Isabelle Aubret en 1970. Celui-ci adjoint à la version classique une seconde, en prose, celle-là même qui sera par la suite la plus reprise et illustrée notoirement par Gustave Doré. Il est décrit par Antoine de Baecque comme « un documentaire extrêmement réjouissant et stimulant : une forme cinématographique de « science-en-s'amusant ». La préparation du film va s'étaler sur « six à huit mois[24] », non sans quelques problèmes de budget (voir plus bas). Le conte de Perrault dans son intégralité : Peau d'Âne. Ce jeudi ressort, aux éditions de La Martinière, "Il était une fois Peau d'Âne", livre de Rosalie Varda et Emmanuel Pierrat. Jim Morrison à Chambord Sur le plateau, soufflait d’ailleurs un vent de légèreté. C’était horrible, inutilisable. Demy joue aussi avec les potentialités du matériel technique et n'hésite pas à placer la caméra à l'envers ou à inverser la pellicule au montage pour obtenir certains effets sans pour autant que l'image soit sens dessus dessous. Lorsque j’ai lu le scénario de Peau d’Âne, j’ai retrouvé les émotions de ma lecture d’enfance, la même simplicité, le même humour, et, pourquoi ne pas le dire, une certaine cruauté qui sourd généralement sous la neige tranquille des contes les plus féériques. Demy renonce à la mise en scène ambitieuse dont il rêvait dès les premières moutures du scénario, en mars 1969, et qui prévoyait des plans mobiles et complexes au moyen de grues et de travellings[42]. Le laid est transfiguré et le beau promulgué au nom de « l'amour de l'amour »[131]. Le petit chaperon rouge, Hansel et Gretel : la pédophilie et le viol. Enfin, la rêverie des deux amoureux, qui commence dans la chambre du Prince, fait appel à un procédé de surimpression : Demy filme une première fois la version où le jeune homme est au lit, puis rembobine la pellicule avant de le filmer une seconde fois sur fond neutre se levant pour rejoindre la princesse de son rêve[59]. J'ai compris # Histoires à raconter # Contes. Peau d'âne. L'esthétique du film tient de la transgression. Dès le début du conte, le vulgaire se mêle au noble : c'est grâce à l'âne qui pond de l'or que le Roi bleu est prospère en son royaume, un miracle qui a des relents de scatophilie. Pistes pédagogiques « Peau d’âne » de Jacques Demy (France 1971) 2015 4 Marie -Anne Gaudard -Smaër Coordinatrice Éducation Nationale Ecole et Cinéma 31 Proposition 3 : Le merveilleux dans le film, le personnage de la fée des lilas Cette dernière révèle alors à sa filleule que « tout est arrangé » et qu'elle-même épousera le Roi. Je me souviens de l’avoir doublée quatre ou cinq fois. ». iStock - JoseIgnacioSoto . Un 45 tours réunissant deux extraits de la bande sonore du film, Recette pour un cake d'amour et Conseils de la Fée des lilas, sort quelques mois plus tard chez Pathé Marconi[72],[73] ainsi qu'un 45 tours produit par Michel Legrand et comprenant la Chanson du Prince et Amour, Amour, interprétées respectivement par Jean-Pierre Savelli et Angela (Productions ML, réf.45.542)[74]. Lorsque les chevaux qui tirent son carrosse, devenu charrette au long du voyage, s'arrêtent d'eux-mêmes en pleine forêt, la jeune fille, qui a désormais l'apparence d'une gueuse, s'enfonce dans les bois. Mais le jeune homme paraît aveuglé par cette image de la Princesse dans sa robe du soleil, si bien qu'il ne lui reste qu'à détourner les yeux et s'enfuir. ». Défilant par rang social, elles ont droit à un essai chacune, mais la séance s'éternise et le Prince se lasse. Plus tard, une fois Peau d'âne établie dans la vie quotidienne du village, deux valets de ferme se moquent d'elle en la surnommant « Cucendron », comme le fait l'aînée des demi-sœurs envers l'héroïne éponyme de Cendrillon. Le lit de la Princesse est complètement raté ; on ne l’a pas fait faire là où il aurait fallu. Voir, « Les princesses d'abord, les duchesses ensuite, et les marquises, les comtesses et les baronnes derrière. Pour les masques d'animaux du Bal des chats et des oiseaux, Jacques Demy a en tête les travaux fantasmagoriques qui ont fortement influencé les surréalistes et Jean Cocteau, de l'artiste et décoratrice de théâtre Leonor Fini, qu'il a rencontrée en novembre 1969[18]. La rêverie qu'il partage avec la Princesse est d'ailleurs de l'ordre du rêve enfantin : alors même qu'ils sont émancipés de toute surveillance des adultes et de toute responsabilité liée à leur rang dans leur royaume respectif, les deux jeunes gens choisissent de poursuivre leurs jeux d'enfants, en roulant dans l'herbe ou en se gavant de pâtisseries[47]. », « Si un prince charmant ne vient pas m'enlever, je fais ici serment que j'irai le trouver moi-même, « une fée très humaine, assez égoïste et enquiquineuse », « comme un homme pressé qui veut sortir d'affaire », « Nous ferons ce qui est interdit / Jusqu'à la fatigue, jusqu'à l'ennui, « juste [à] réaliser un film dérangeant contre l'ordre établi et l'éducation judéo-chrétienne, « le sujet est formidablement intéressant, « questions de culture et de législature », « L’amour fait souvent grand tapage / Au plus bel âge / Il crie, il déchire, et il ment / Pauvre serment », « Nous ferons ce qui est interdit / Nous ferons tous des galipettes / Nous irons ensemble à la buvette / Nous fumerons la pipe en cachette / Nous nous gaverons de pâtisseries », Tous deux seront finalement partenaires en 1964 dans, Une première version, due à Vanderburch seul, avait vu le jour en 1808 au. Le film est en fait une adaptation de cette dernière, dont l'auteur reste inconnu[117]. Catherine Deneuve Delphine Seyrig Jacques Perrin Jean Marais Micheline Presle, Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution. Dans le royaume où l'héroïne s'est établie se trouve un prince charmant (Jacques Perrin), qui languit après un amour qu'il n'a pas encore trouvé (Chanson du Prince). Pour échapper à cette union incestueuse et sur les conseils de sa marraine, la princesse demande à son père par trois fois, pour sa dot, des robes irréalisables : elle demande d'abord une robe couleur de temps, puis une robe couleur de lune et enfin une robe couleur de soleil. Le miroir est enfin un moyen de communication équivoque, qui met en relations des univers pour qui sait comment y regarder. Tous deux s'avouent mutuellement leur amour et expriment leur désir de vivre ensemble, libérés de leurs parents et de toute contrainte (Rêves secrets d'un prince et d'une princesse) . Peau d'âne, de Cécile Chicault, une réécriture graphique du conte poétique du XVIIème Dans le conte en vers de Peau d'Ane, mourante, une reine se fait promettre par le roi de ne prendre pour nouvelle épouse qu'une femme plus belle qu'elle. » Ce n'est d'ailleurs que lors de son départ du château qu'elle obtient enfin un véritable nom, « Peau d'âne », elle qui auparavant n'était désignée que par son titre et son lien avec son père. Peau d’Âne est un conte populaire. « Comme les autres filles, j’aimais les histoires de fées et de sorcières, de rois et de princesses, de perles et de crapauds[n 6]. Le fidèle collaborateur de Demy, le décorateur Bernard Evein, a eu du mal à établir un devis, tant les éléments de comparaison manquent pour un film aussi inhabituel que Peau d'âne. Mais la seule personne capable de rivaliser avec sa beauté n'est autre que sa propre fille, et le roi la demande en mariage. L'usage des chansons cimente aussi les films entre eux, à l'instar d'Amour, Amour, que les deux jeunes protagonistes partagent sans s'être déjà rencontrés et qui nous apprend qu'ils sont destinés l'un à l'autre, tout comme c'est le cas de Delphine et Maxence (Deneuve et Perrin) dans les Demoiselles[69]. » Dans Le Monde, Jean de Baroncelli rejoint cet avis : « Aux amateurs de divertissements somptueux, un cadeau royal est offert [...]. La version restaurée est également diffusée sur Arte le soir de Noël en première partie de soirée. Ce sont d'ailleurs des blanchisseuses qui sont les premières à se moquer de l'apparence de la jeune fille. Riche de son expérience américaine, une certaine désinhibition gagne peut-être Demy, qui tend alors vers plus d'audace au regard de la production cinématographique française traditionnelle[16]. Il avait cette âme qui n'est pas que féérique mais aussi mélancolique. Peau d'âne Adaptation d’un onte de Pe ault Récit tiré des Contes de ma mère l'Oye de Charles Perrault Il était une fois un roi très puissant. C'est-à-dire l'appauvrir véritablement alors que c'est un film qui réclamait du fric puisque c'est un film sur de la magie et que la magie ça se paie très cher, « Puis, au tournage, un technicien s'est promené avec un projecteur 16, « la projection aurait été déformée par les plis de la robe. En incorporant au motif classique de la fugue des rythmes et des instruments plus modernes (comme les instruments électroniques), Legrand souhaite en effet se démarquer des thèmes médiévaux utilisés précédemment par d'autres films, tels Les Visiteurs du soir de Marcel Carné (1942)[65]. La rêverie des deux amoureux, au son de la chanson Rêves secrets d'un prince et d'une princesse, dissimule un manifeste hippie et un appel à enfreindre les interdits dans ses paroles équivoques[17] : « Nous ferons ce qui est interdit / Nous ferons tous des galipettes / Nous irons ensemble à la buvette / Nous fumerons la pipe en cachette / Nous nous gaverons de pâtisseries ». Il refuse toutes les prétendantes proposées à l'exception d'une superbe jeune fille blonde qui se révèle être sa propre fille ! La Princesse, déguisée en souillon et couverte de la peau de l’âne, se sauve alors dans une ferme. La situation mérite attention. Elle rend alors visite à sa marraine, la Fée des lilas (Delphine Seyrig), pour obtenir son conseil. Il le cite dès 1962 comme l'un des scripts sur lesquels il travaille ; il envisage à l'époque dans les rôles-titres Brigitte Bardot et l'Américain Anthony Perkins, qui tourne alors beaucoup en Europe[13],[10],[14]. : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article. C’est elle qui vient au secours de la Princesse face à la demande du Roi, c’est elle l’instigatrice des demandes (épreuves infligées au Roi) jusqu’à l’ultime : tuer l’âne-banquier, lui faire la peau donc supprimer ce qui fait le royaume donc ce qui fait le Roi. Pour les robes incroyables commandées par la princesse à son père, il fallait des demandes impossibles, des teintes tout droit sorties de l’imaginaire et qu’on ne pouvait toucher du doigt dans le monde réel.